30 juillet 2014

Bohol à scooter

Mes dernières aventures, cette fois-ci sous la forme d'un journal de bord: plus de détails, plus d'anecdotes, malheureusement moins de belles photos (plus le séjour est court, plus j'écris des tartines...) À vous de voir ce que ça donne !

Palawan et Luçon étant maintenant très régulièrement frappées par la mousson, mon programme pour ces quelques jours était la découverte de Bohol, une île de l'archipel des Visayas, connue pour ses 'Chocolate Hills', ses tarsiers... et aussi pour avoir été victime d'un grave séisme l'année dernière, seulement 3 semaines avant le passage du super-typhon Haiyan à proximité (sur l'île voisine de Leyte). 

Il y a des années comme ça...


Trajectoire du cyclone Haiyan (3-11 Novembre 2013)

Après 7 semaines de boulot relativement ennuyeuses (mais qui se sont magnifiquement terminées: fin de la phase de dragage, notre technique de déversement de roches - rockdumping - bien en place et approuvée par le client, tout cela le jour même où René appelle pour nous annoncer notre augmentation… il y a aussi des jours comme ça parfois :D) à bord de mon bateau chinois, je retrouvais mes petites habitudes chez Quentin et Mèl à Makati.

Lorsqu’ils me questionnent sur mes projets pour la semaine, tout en nous rendant à la pendaison de crémaillère d’amis à eux (le clan des jeunes expats français, majoritairement des VIE-VIA et leurs moitiés), je leur parle de Bohol (suggestion de ma manager lorsqu’elle a su que je partai pour les Philippines; je n’étais plus très sûre de ma vraie mission alors: le boulot ou les vacances ? ;) Ils me disent 'Carrément! Faut que t’ailles à Nuts Huts!', et Vick confirme en suggérant de louer une moto pour me déplacer. 'Tu verras, c’est pas dur, ils en ont des automatiques' a-t-elle répliqué lorsque, les yeux brillants d’excitation, je lui avouai avec amertume avoir une expérience très limitée en matière de 2 roues motorisées…

Bye-bye Manille, Hello Tagbilaran !

Mais aussitôt dit, aussitôt fait, et quelques heures plus tard, j’atterrissais à Tagbilaran. Je récupère un plan de l’île au comptoir de l'aéroport avant de sortir et me faire assaillir par des conducteurs de tricycles. 100 pesos pour m’emmener chez un loueur… je trouve ça cher, continue de marcher, et 20 mètres plus loin, la course était à 10 pesos… 50 mètres de plus et ils me payaient pour que je monte dans leur carrosse, non ?!? :D


La Loc'

Mon chauffeur de tricycle me dépose dans une arrière-cour assez miteuse; la seule preuve d'être arrivée à destination est une planche peinte Boysam pendue à un portillon de l'autre côté de la rue. Après quelques secondes d'explications dans un anglais très approximatif, le loueur et mon chauffeur m'accompagnent dans la rue où trône un beau scooter; le loueur me tend la clé, je le regarde avec étonnement, il insiste, je récupère la clé, attend 5 secondes, puis me résigne à m’asseoir sur mon futur destrier devant le manque de réaction général. Je cherche avec plus ou moins de succès où insérer la clé, lorsqu'enfin l'un des deux me demande mi-rieur, mi-angoissé: 'Tu as déjà conduit un scooter n'est-ce pas?' Et ben non, je viens de vous le dire; c'est pour ça que je voudrais faire un essai d'abord... 

Là, le visage du loueur s'est décomposé; son pote le chauffeur de tricycle a alors pris les choses en mains en me montrant comment démarrer, puis en me faisant signe de faire un essai dans la rue; je me lance donc sous les 'slooooowly-slooooowly-slooooowly' à répétition du loueur qui venait de se remettre de son angoisse. Et....... c'est très facile en fait! Petit demi-tour, je reviens vers eux tout sourire; le loueur me conseille de continuer à m'entraîner un peu... Mais t'inquiète Biquette, je gère! Et je reviendrai entre demain (si je ne le sens pas finalement) et mercredi (avant de prendre l'avion), ça marche? Il approuve, puis je règle 2 jours d'avance avant de m'attaquer à un 2ème obstacle: le plein. 

Pour cela, je me tourne vers mon chauffeur de tricycle, et lui promets un bon pourboire s'il me conduit à une station essence et me met sur la route de Loboc, où j'avais décidé de passer la nuit (et comme ça, quelqu'un avait un œil sur moi pendant mes premières minutes à scooter... pas folle la guêpe!) 

Tout marche comme sur des roulettes (haha, riez maintenant), et moins d'un quart d'heure plus tard, je savourais mon vrai premier jour de vacances, cheveux au vent (c'est une blaaaaague: ils étaient en fait collés par la transpi dans le casque ;) et avec 2 heures devant moi pour me rendre aux fameuses Nuts Huts


Nuts Huts ?

Un endroit idéal pour se reposer 1 ou 2 jours selon nombre de voyageurs, à dormir dans des cabanes en nypa, au bord de la rivière Loboc. Mon scooter a du venir à bout de quelques kilomètres d'un sentier pierreux indigne de ses petites roues frêles et fragiles pour rejoindre la centaine de marches qui descendent à la rivière, mais je suis sûre que la vue dont il a joui pendant les 2 nuits et 1 jour à m'attendre l'aura rasséréner pour la suite du voyage.



Le lendemain, petite rando sur la colline qui domine Nuts Huts. Mis à part le temps et la vue magnifiques, l'intérêt était de découvrir quelques grottes très bien cachées dans la jungle, où demeurent des milliers de chauve-souris (et, dédicace pour Papa, qui abritèrent des GIs pendant la guerre du Pacifique) 

Ce que je retiendrai de cette petite aventure est que les chauves-souris PUENT (je comprends maintenant pourquoi Cat Woman a toujours repoussé les avances de Batman!), et que leur présence se traduit également par un bruit permanent de légère brise. 



Un chouïa plus mignon que les chauves-souris...

J'ai volé !

La rando s'est soldée par un vol au dessus de la vallée, à la Superman. Au détour du chemin, entre trois maisons construites au bord du canyon au fond duquel coule la rivière Loboc, le guide s'est arrêté à côté d'une petite structure en fer... qui n'était autre que le point de départ d'un câble de 200 mètres de long, tendu au dessus de la gorge! Quelques mètres en contrebas, l'arrivée d'un autre câble témoignait de la possibilité de faire en fait un aller/retour en tyrolienne au dessus de la gorge, et ce en position allongée, à plat ventre dans une toile reliée en plein d'endroits à 2 poulies, à voler quelques mètres au dessus des arbres, puis soudain franchir la falaise et voir ces quelques mètres se transformer en une bonne centaine, au dessus de la rivière; un regard à droite, un autre à gauche pour admirer le défilé; un coup d'oeil vers mes pieds pour voir d'où je viens, puis un autre vers l'avant juste avant de repasser la falaise, pour enfin lever la tête et réaliser que j'arrivai à pleine vitesse tête la première vers un grand filet tendu juste devant un arbre; je ferme les yeux en comprenant enfin l'utilité du casque, tout en me disant intérieurement que ça n'était peut-être pas très sécuritaire comme arrêt, lorsque ma poulie s'arrêta d'un coup sec, à quelques mètres dudit filet, bloquée par ce qui semblait être un bout de caoutchouc fixé autour du câble et retenu par une corde tendue par un des 'réceptionnistes'... Inutile de vous dire que C'ÉTAIT TROP BIEN !!!!! D'autant plus qu'on doit survoler la vallée 2 fois de suite, pour revenir à notre point de départ et poursuivre la rando :)




Loboc

L'après-midi, je suis descendue en kayak le long de la rivière jusqu'à la ville de Loboc, où j'ai pu me rendre compte avec plus de justesse de l'ampleur des dégâts liés au tremblement de terre. Car l'état excellent des routes (priorité lors de la reconstruction d'urgence afin de désenclaver les villages et les approvisionner en eau potable) et les sourires omniprésents des habitants ne suggèrent aucunement le cataclysme qu'ils vécurent il y a 9 mois. En réalité, presque chaque structure en pierre dans chaque village, ce qui malheureusement incluent les belles églises coloniales du 16e siècle, sont toujours en ruines...








Le pont manquant de Danao

Le lendemain, je décidai de m'enfoncer dans l'île, avec pour objectif Danao, un petit village au milieu de nulle part, dont personne n'a su me dire si la route qui y menait était praticable ou non. Cela avait évidemment suffi pour éveiller ma curiosité et l'envie de m'en rendre compte par moi-même. Et il s'est avéré que oui, l'alternance route goudronnée / cimentée / piste / boue / cailloux est en effet tout à fait praticable... jusqu'à l'entrée du village, où un pont manquait, tout simplement :)

Je m'arrête pour évaluer la situation, repère sur la droite un sentier assez raide descendant vers le ruisseau que le pont était censé franchir, lorsqu'un ado surgit au détour du chemin:
- Tu veux aller à Danao? 
- Oui, mais je ne sais pas par où passer.
- Mais par là, comme tout le monde
J'ai alors essayé de lui faire comprendre mes pensées: c'est un SENTIER: étroit, raide, plein de cailloux, avec un RUISSEAU, assez large, qui semble profond, aussi plein de cailloux... De plus, je ne crie pas comme une fille je ne suis pas une pro du scooter. 
Mais mes explications n'ont eu aucun effet sur lui:
- Tout le monde passe par là, sinon, il faut faire un grand détour! Tu vas voir, je vais t'aider...

Bon bon. Je m'assois sur mon fidèle destrier, puis me lance dans la pente, les mains crispées sur les deux freins, les pieds de chaque côté pour m'équilibrer, et mon dépanneur retenant le scooter à l'arrière. Nickel. 

Une fois au ruisseau, mon assistance s’apprêtait à poursuivre son chemin lorsque je lui demande avec insistance:
- Et maintenant, je fais quoi, Einstein?
- Ben tu vas tout droit. 
Question idiote, réponse idiote. 

Devant ma mine déconfite, il reste en me remontrant bien comme il faut où passer dans le ruisseau. Je devais avoir 2 fois son âge, et je décidai de me lancer avant que le petit sentiment de honte qui pointait son nez finisse par me paralyser complètement. Moteur à fond, je ferme les yeux, c'est parti! Mais mon scooter s'arrête 2 mètres plus loin, au beau milieu du cours d'eau; je reprends équilibre avec mes jambes; l'eau est froide et le ruisseau pue, mais tant pis pour mes baskets, elles en ont vu d'autres; je redémarre en priant pour ne pas avoir noyé le pot d'échappement, mais pas moyen de bouger; mon petit philippin se marre (le malotru), puis m'aide à pousser et tirer la bête dans tous les sens, tant et si bien que l'on finit par la sortir du ruisseau, du pierrier, et même lui faire reprendre roue sur la route bitumée. Ouf! 

Ni une ni deux, Einstein monte derrière et me dit de le déposer au collège. Impressionnée par son assurance, je le conduis avec plaisir, en hommage à ma reconnaissance éternelle...

~

Quelques dizaines de minutes plus tard, je survolais une vallée encore plus belle que celle de Nuts Huts, toujours en tyrolienne, la grande spécialité du pays semble-t-il, puis prenais mes quartiers dans une auberge encore en construction, déserte, avec piscine et une vue magnifique, à peine 10 minutes avant qu'un énorme orage éclate. 

Mes hôtes, un couple de 28 ans très serviable et parlant à peine anglais (leur langue maternelle n'étant même pas le tagalog mais le visaya), m'ont pris de court en me demandant ce que je voulais manger; j'ai opté pour le fameux riz frit à l'ail que j'adore, et un œuf, le tout cuisiné dans le noir au feu de bois, l'électricité et l'eau courante (qui était coupée lorsque j'étais là-bas) n'arrivant pas jusqu'à la cuisine, extérieure. J'ai voulu profiter de ce moment convivial pour me renseigner sur le vainqueur la coupe du monde.
- Coupe du monde? 
- Oui! De foot! ...football ? ...au Brésil? ...la finale était hier ?!? 
Grand silence, regards étonnés... Bon bon, je peux attendre quelques jours de plus, c'est pas grave.

Le riz frit à l'ail est ce que je retiendrai de la cuisine philippine !! :D
Source

L'essence de derrière les fagots

Le lendemain, je partis tôt le matin, direction la côte ouest cette fois-ci. Au bout d'une heure de route, il me fallut faire le plein; alors que je traversais un petit regroupement de maisons et qu'un homme me saluait de la main en souriant (comme tous les habitants de cette île depuis le début de mon périple), je m'arrêtai et lui demandai où trouver un peu d'essence; il me fait signe (je ne maîtrise toujours pas le visaya) de continuer un peu; jusqu'au prochain village? Non non, juste 2 mètres plus loin, puis il disparut dans son garage; entre temps, son voisin d'en face, l'interprète du village, me rejoignit et me demanda combien de litres je voulais; j'haussai les épaules en signe d'ignorance puis ouvris le réservoir; son œil d'expert me conseilla 2 litres; mon pompiste en herbe réapparut, 2 vieilles bouteilles en plastique de Coca remplies d'essence à la main... et 42 secondes plus tard, je repris la route, toujours aussi discrète, assise sur ma tondeuse à gazon, avec mon sac-à-dos et mon casque trop grand.

Entre palmiers et rizières, ma route était parfois coupée par un bœuf et sa charrue, ou une poule et ses poussins, et mon passage jamais inaperçu, toujours salué par des sourires et des signes de la main.

Sagbayan: les dernières 'Chocolate Hills' avant les eaux du détroit de Cebu


Les mangroves d'Abatan

Une fois sur la côte, je retrouvais une route parfaitement asphaltée... et une pluie permanente. En sortant de Cortes, je m'abrite sous le grand préau d'une agence offrant des tours dans les mangroves de la rivière Abatan, me renseigne sur les sorties en kayak, et promets de revenir le soir pour apercevoir ces fameuses lucioles qui intriguèrent tant les espagnols il y a quelques siècles.

Une chambre à Tagbilaran réservée, je renoue avec Internet le temps de 10 minutes pour donner signe de vie et apprendre que les Sandales-Chaussettes ont enfin remporté leur premier trophée, puis remonte sur mon scooter, me lance dans les rues gorgées de 2 roues, parfois de 4x4, slalome, m'impose, et finalement réussis à sortir de la ville saine et sauve malgré l'heure de pointe, des lucioles et des légendes locales plein la tête... 

C'était sans compter sur le cyclone qui était la cause du mauvais temps depuis 2 jours, et qui frappa Manille de plein fouet quelques heures plus tard (les rues désertes, un vent et des averses insoutenables, l'appart de Quentin et Mèl - comme la plupart des autres immeubles qui en sont équipés - sur générateurs, et les autres sans électricité pendant plusieurs heures... 'Ils ont pris cher' paraît-il).

Car ce soir-là, à l'embouchure de la rivière Abatan, le temps était lourd, le ciel chargé de nuages gris noirs, et le vent très fort; un peu comme cette heure précédant nos gros orages d'été pendant laquelle on sait que Dame Nature est entrain de nous préparer une petite démonstration de sa puissance, et qu'il faut vite creuser des rigoles autour des tentes et tout mettre à l'abri du vent et de la pluie. Cela ne m'a pas découragé pour autant, bien au contraire, mais les lucioles, elles, ne sont pas folles, et restent dans les mangroves, abritées du vent et de la pluie.

On illumine, mais nous ne sommes pas des illuminées ! -Ray

Mais pas question d'annuler, car ce soir-là était mon dernier sur l'île! J'ai donc quémandé une virée en kayak, même sans les lucioles, et après s'être assuré de mon niveau, le guide a fini par dire oui, mais à condition de rester dans les mangroves, c'est à dire dans l'embouchure, car les vagues étaient déjà trop hautes en pleine mer... j'avais envie de dire 'Mais justement, c'est ça qui est bon !!!' ... mais un petit regard échangé avec la responsable d'agence qui traduisait la pensée 'C'est qui cette folle?!?' m'oblige à accepter le marché (je n'ai pas encore l'aptitude de Raj à pouvoir convaincre un loueur de kayak de me prêter une embarcation pour aller caresser les icebergs en simple anorak...) 

Et malgré la durée bien trop courte de notre sortie, j'ai ADORÉ pagayer dans le labyrinthe des étroits chenaux naturels, entre les mangroves, abrités du vent, à épier les petits crabes noirs aux pinces violettes appelés nypa-nypa (parce qu'ils vivent dans les racines des palmiers nypa... pourquoi s'embêter la vie à chercher un nom compliqué, je vous le demande!), ou sur le fleuve, plus large, aux eaux déjà bien agitées par la tempête qui se préparait... avant de rejoindre l'Abatan Bridge, encore effondré: 

Source
mais dont les piles ont pu être utilisées pour une solution temporaire:
Panglao

Le lendemain était mon dernier jour sur l'île, mon avion décollant à 16 heures. Je décidai donc de profiter d'une demi-journée à Panglao, LA vraie raison de venir sur l'île pour de nombreux touristes (c'est donc tout naturellement que j'avais pris la direction opposée en arrivant...)
Après une rapide visite de la grotte de Hinagdanan, je me suis donc vautrée sur un transat, à lire, me reposer, prendre des photos, siroter un mango-shake tout en essayant de ne penser à rien; ça fait du bien une fois de temps en temps.




Preuve que je me suis tout de même levée de mon transat ;)




Air Asia et les cyclones

Puis il a bien fallu reprendre la tondeuse, la rendre puis me rendre à l'aéroport et rejoindre Quentin et Mèl pour ma dernière soirée aux Philippines avant de rentrer en France pour le mariage de Perrine et Aurélien... Mais là encore, le typhon fit des siennes: votre vol est annulé me dit-on (toujours en souriant bien sûr). Ah! Et donc? Ben rien de grave, on vous a mis sur le vol suivant. Qui part à...? 17 heures, demain. Ben oui, bien sûr! 

En temps normal, je me serais dit 'Quelle plaie, corvée de Bohol...! Bon ben tant pis, j'irai voir les dauphins en buvant d'autres mango-shakes. Je m'adapte moi! Un petit coup de fil à Esther pour décaler mon vol d'un jour et c'est réglé...'

SAUF que cette fois-ci, j'avais un mariage, et AUCUNE envie de louper ça !!!!! Alors non, trouvez-moi une autre solution s'il vous plaît ! Vous pourriez aussi décoller de Cebu demain matin à 5 heures... Parfait ça !! On me griffonne l'horaire et le numéro du vol sur un bout de papier (la vérité vraie!) puis je me jette dans un tricycle, direction le port, pour attraper le dernier ferry en partance pour Cebu.

Là encore un grand moment: le terminal est un grand chapiteau, mais climatisé et avec des écrans et des contrôles de sécurité comme dans un aéroport; la configuration des sièges à l'intérieur du ferry rappelle aussi celle d'un avion long-courrier, mais avec encore moins d'espace pour les jambes, une température frigorifique, et une prière de bénédiction pour tous ceux qui vont effectuer la traversée au lieu des instructions de sécurité de l'hôtesse que personne n'écoute. Ce qui me rappela la réaction des parents d'une philippine rencontrée à Manille lors d'une soirée VIE, qui, suite à un accident qui faillit causer la noyade d'une de leurs filles, interdirent à leurs enfants de s'approcher de l'eau (au lieu de leur apprendre à nager comme je l'imaginais...)

Je mis à profit mon heure d'attente en me plongeant dans le Lonely Planet, section Cebu: 2ème plus grande ville des Philippines (aïe aïe aïe, bonjour les voitures, les bouchons, la pollution...) gnagnagna ... le centre-ville historique près du port craint (nickel, ça me fera de nouvelles anecdotes!), il vaut donc mieux dormir dans un autre quartier plus au nord (hmmm... ça pourrait aussi être sympa de rester un peu dans le centre-historique puis se faire une mission jeepney vers là-bas?) gnagnagna ... l'aéroport est sur l'île de Mactan (mince, c'est où ça?!?) à 20 minutes en taxi - ne pas payer plus de 200PHP (ah ok, je ne me suis pas gourrée de ville alors...) où, en 1521, mourut Magellan de la main de Lapu-Lapu, roi de Mactan, qui n'a pas voulu se soumettre à la couronne d'Espagne comme le fit pourtant si bien son voisin de Cebu Rajah Humabon... Hmmm, intéressant tout ça... 

Je lève la tête, réfléchissant encore à la meilleure option pour la nuit, et louche sur l'iPhone de mon voisin. Après quelques secondes d'hésitation, je lui demande s'il me laisserait passer un coup de fil. Il accepte en souriant, mais Quentin ne décroche pas, et il est enfin l'heure d'embarquer. 

Après 2 heures de traversée, la nuit était tombée... et Mr iPhone, qui avait débarqué avant moi, m'attendait gentiment sur le quai pour m'informer que le numéro que je cherchais à joindre avait envoyé un texto. Je le remercie mille fois et rappelle Quentin pour m'excuser (notre dernière soirée tombait à l'eau) et mettre au point la récupération des clés le lendemain matin... Un plan élaboré, je raccroche, et Mr iPhone me demande ce que je compte faire, car il doit se rendre à l'aéroport pour s'acheter un billet pour Manille demain. Quelle coïncidence! Moi, j'aimerais aussi me rendre à l'aéroport pour vérifier si je suis effectivement sur le vol de 5 heures (un bout de papier gribouillé ne convaincra probablement pas l'hôtesse si jamais la résa a foiré), et si ce fameux vol de 5 heures va effectivement décoller... et ensuite, probablement dormir pas loin vu l'heure à laquelle je devrai me lever. Cebu et la croix de Magellan seront pour une autre fois.

Mr iPhone part donc chercher sa voiture et repasse me prendre 15 minutes plus tard, direction Mactan. J'étais effectivement enregistrée sur le bon vol, me fais imprimer la preuve d'un vrai billet électronique sur une vraie feuille A4 et confirmer que mon avion décollera demain à l'heure prévue, puis retire un peu de liquide en attendant que Mr iPhone - devenu Mr Taxi et qui s'appelle en fait Ryan et vient de Leyte - sorte de chez Philippine Airlines. Je le remercie encore, et m'apprête à lui dire au revoir, lorsqu'il me propose de me déposer dans un hôtel pas loin avant de rentrer sur Cebu. Fantastique! 

Le premier hôtel est complet. Au deuxième, je me retrouve nez à nez avec un client qui attendait son tour, la réceptionniste étant au téléphone. Il me demande en anglais si je suis australienne, non non, française, puis il s'enflamme d'une voix chantante à l'accent Marseillais; les 10 minutes pendant lesquelles la réceptionniste se démenait avec le client insupportable du bout du fil suffirent à mon petit Marseillais pour me raconter à peu près toute sa vie; enfin la réceptionniste raccroche... pour m'annoncer que l'hôtel était aussi complet! Je la remercie et ressors rapidement, honteuse de faire attendre Ryan aussi longtemps, mais mon Marseillais me rattrape avant que je ne passe la porte, et me propose de partager sa chambre. Hahaha. Haha. Ha. Je décline poliment sous prétexte de ne pas vouloir déranger, surtout si je dois me lever à 3 heures, et m'éclipse en courant. Et le troisième hôtel fut le bon. Un peu cher, mais Mastercard comprendra. Ouf! 

***

Malgré leur propension à mettre du beurre de cacahuète de partout, et à vivre à 100 millions sur des petites îles (impossible de s'isoler! même au beau milieu de Bohol, il y avait toujours quelqu'un au détour du chemin, une cabane à moitié cachée par la végétation, ou une femme piquant du riz dans un champ au loin...), la serviabilité et le sourire omniprésent d'une majorité des philippins que j'ai rencontré (Manille et certains lieux touristiques mis à part, où j'ai l'impression d'avoir le physique d'un billet de 1000 pesos plus que d'une voyageuse avide de rencontres et de découvertes) feraient presque oublier la pauvreté d'un pays régulièrement frappé par les typhons et les tremblements de terre. 

Et certains signes tels que l'habitude de recharger les bouteilles en plastique d'eau traitée et purifiée (au lieu d'acheter puis de jeter des dizaines de petites bouteilles d'eau en plastique par jour et par personne comme dans beaucoup d'autres pays, même supposés développés) ou ce sentiment de sécurité ressenti durant toute mon escapade (alors que je me baladais avec mon passeport, ma carte bleue, et suffisamment de liquide pour faire vivre une famille de 10 personnes pendant une semaine) montre que cette nation peut aussi se montrer en avance dans son développement.

Les Philippines sont une destination qui séduit chaque année plus de 4 millions de touristes (essentiellement des Sud-Coréens), ce qui n'est rien comparé aux voisins continentaux que sont la Chine, la Thaïlande, la Malaisie, Hong-Kong, Macao ou Singapour, mais c'est un chiffre qui n'a de cesse d'augmenter. La grande campagne marketing lancée par le Ministère du Tourisme en 2011 y serait-elle pour quelque chose...?